Les récentes pluies au Sahara ont provoqué le reverdissement du désert, ce qui a grandement réjoui les éleveurs. Les pâturages sont maintenant verts, mais pour combien de temps ? Une partie de la viande consommée en Algérie provient de pays tels que l’Espagne, la France, la Nouvelle-Zélande, le Brésil, le Mali ou le Niger.
Les éleveurs étrangers s’organisent pour répondre à la demande des consommateurs algériens. Les éleveurs et les circuits européens rivalisent d’imagination pour approvisionner le marché algérien ainsi que ceux des pays du sud de la Méditerranée qui ont une carence structurelle en viande de veaux. Déjà en 2014, un expert du marché algérien témoignait dans la revue française Réussir Bovins Viande de veaux des pratiques des éleveurs espagnols : « Ils achètent des veaux croisés de huit jours dans les pays de l’Est (Roumanie, Autriche, Pologne, Tchéquie) ou en Irlande et en Écosse, qui arrivent en Espagne à 100 euros pièce.
Ils les élèvent jusqu’à 480 kg, puis l’expédient vers l’Algérie. » Le spécialiste de l’élevage Bernard Griffou soulignait également dans la même revue le risque de concurrence des veaux espagnols, polonais et hongrois pour la filière française. Il notait qu’en 2013, la filière espagnole avait exporté entre 8 000 et 10 000 bovins (hors reproducteurs) vers l’Algérie.
À l’époque, le succès de la filière espagnole s’expliquait par l’abondance de pâturages et le savoir-faire des agriculteurs locaux dans l’élevage de veaux de lait. Ils s’étaient spécialisés dans ce créneau avec lequel la moindre erreur entraîne une forte mortalité chez les veaux de quelques semaines à peine.
L’Institut français de l’élevage a aussi souligné dans la revue Réussir que si l’Algérie décidait d’ouvrir ses frontières aux veaux polonais, hongrois ou autres, il y aurait de fortes chances qu’ils s’implantent, comme cela a été le cas en Turquie.
L’existence de différentes contraintes dans l’import de la viande de veaux
Il apparaît que les éleveurs européens, qu’ils soient ceux des pays de l’Est ou ceux de la Péninsule ibérique et de France, disposent de conditions climatiques qui favorisent la présence de pâturages naturels et d’importantes productions fourragères. À cela s’ajoutent un savoir-faire des éleveurs et une demande des consommateurs en boucherie permettant la valorisation des meilleurs morceaux de viande de veaux sur une carcasse.
Les dérèglements climatiques actuels viennent perturber cette situation. L’extension constante de la Maladie hémorragique épizootique (MHE) en France s’expliquerait par la hausse des températures qui privilégierait le moucheron piqueur vecteur de cette maladie.
Par ailleurs, face à une sécheresse exceptionnelle et au manque de fourrages, une tendance apparaît en Espagne chez les éleveurs spécialisés dans l’engraissement : l’importation d’animaux français plus lourds. Ainsi, la durée d’engraissement est réduite et est en adéquation avec leur disponibilité en fourrage.
En ce sens, en Algérie, l’absence d’importations d’animaux de moins de 350 kg permet aux éleveurs des économies de fourrages. Il reste cependant à étudier l’intérêt d’une éventuelle importation de veaux laitiers, ce qui équivaut dans un élevage avicole à élever des poussins.
Actuellement, la filière algérienne de l’engraissement de bovins doit faire face à l’arrêt des importations d’animaux sur pied suite à l’apparition de la MHE en France, ce qui déstabilise les éleveurs qui se sont spécialisés dans ce créneau. À côté de la filière bovine viande, la filière ovine en Algérie comprend 18 millions de têtes et assure le revenu de nombreuses familles paysannes. Une filière ovine qui revit avec les pâturages steppiques redevenus verts avec les pluies qui se sont abattues ces derniers jours sur plusieurs régions d’Algérie.
Ces deux filières doivent composer avec celle qui fournit la viande de veaux. Entre ces deux filières, la concurrence est rude concernant l’utilisation du maïs ; la filière avicole comptant sur le maïs grain quand l’autre compte sur le maïs ensilage en complément des pâturages. Une filière avicole qui offre une viande de veaux bien plus accessible aux ménages à faible revenu.