Un an après l’adoption par le Maroc d’une loi autorisant « l’usage légal » du cannabis, plusieurs investisseurs s’apprêtent à se lancer dans le secteur. Mais les ambitions du royaume butent encore sur l’absence d’une agence de régulation et la colère de certains cultivateurs. Nous vous disons plus sur ce sujet à travers cette édition de ce mercredi 13 avril 2022.
En mars, un nouveau pas a été franchi sous le gouvernement d’Aziz Akhannouch: l’adoption d’un décret délimitant les zones où seront autorisées la culture et la production du cannabis à des fins thérapeutiques : Chefchaouen, Al Hoceima et Taounate, trois provinces situées dans le nord du royaume, qui accueillent déjà la majeure partie des plantations de kif.
Notons que ce texte prévoit toutefois « la possibilité d’ajouter d’autres provinces suivant l’intérêt manifesté par les investisseurs nationaux et internationaux à l’égard des activités liées à la chaîne de production du cannabis », a souligné le 3 mars le porte-parole du gouvernement Mustapha Baitas.
« Dans le cadre de l’incitation à l’investissement dans ce domaine, le projet confie à l’Agence nationale de régulation des activités liées au cannabis l’accompagnement des demandeurs de licence et la facilitation de la mise en œuvre des démarches administratives liées à son octroi, conformément aux dispositions de la loi précitée, et ce en coordination étroite avec tous les acteurs concernés », a-t-il ajouté.
Alors que, selon l’article 3 de la loi, personne ne peut exercer l’une des activités (relatives au cannabis) sans autorisation délivrée par l’Agence nationale de réglementation des activités relatives au cannabis.
Pierre angulaire des nouvelles ambitions marocaines en matière de production, transformation, fabrication, commercialisation, importation et exportation du cannabis, l’institution ne pourra cependant pas être instituée de sitôt, ce qui bloque encore tout investissement dans le secteur.
« Il reste de nombreux textes réglementaires qui n’ont pas encore été publiés. On ne peut pas créer une agence dont la mission est de délivrer des autorisations alors que le décret qui détermine les critères d’octroi d’une autorisation n’est pas encore sorti », confie à Middle East Eye une source impliquée dans le projet.
« Ce temps va être consacré notamment à des études, comme par exemple celle portant sur le taux de THC [la principale molécule active du cannabis] qui sera autorisé. Il ne faut pas oublier que les produits marocains devront être conformes aux normes européennes, car l’Europe sera un de nos principaux marchés », ajoute la même source.
D’après les informations recueillies par MEE, une dizaine d’investisseurs s’apprêtent déjà à se lancer dans le secteur en attendant d’obtenir l’autorisation de l’agence – dont le président n’a pas encore été nommé. Soulignons que parmi eux, CBD Rif Morocco, une entreprise fondée après l’adoption de la loi.
« Notre objectif est de devenir leaders sur le marché. Passionnés et fiers de notre héritage, avec la seule idée en tête de créer des produits traditionnels sains et de remettre les recettes et formules ancestrales à base de CBD [cannabidiol, molécule présente dans le cannabis] alimenté aux multiples bienfaits au goût du jour avec une touche de modernité », renseigne ses fondateurs sur le site de l’entreprise.
« De nombreux investisseurs préparent actuellement leurs dossiers mais en l’absence de l’agence de régulation, leur seul contact est le ministère de l’Intérieur », explique à MEE une source qui suit le dossier dans le Rif.