Le vote du RN à l’Assemblée sur la renégociation des accords France – Algérie de 1968 ravive les tensions diplomatiques et relance le débat sur l’immigration.
France – Algérie : Une décision symbolique qui ravive les tensions
Les relations France – Algérie connaissent une nouvelle zone de turbulence. Le 30 octobre, l’Assemblée nationale a adopté, à la surprise générale, une résolution portée par le Rassemblement national (RN) appelant à la renégociation des accords de 1968 sur le statut des ressortissants algériens. Bien que cette résolution soit non contraignante, le Premier ministre Sébastien Lecornu a déclaré qu’il « faut renégocier » ce texte emblématique, signé six ans après la guerre d’Algérie pour faciliter la venue de travailleurs algériens en France.
Ces accords, révisés à trois reprises (1985, 1994 et 2001), instaurent toujours un régime dérogatoire au droit commun, notamment en matière de séjour et d’emploi. Selon Thibaut Fleury Graff, professeur de droit international public à l’université Panthéon-Assas, « cet accord n’a plus qu’une portée limitée, si ce n’est que les Algériens peuvent rester en France plus de trois mois sans visa de long séjour ».
Des privilèges et des restrictions toujours en vigueur
Les ressortissants algériens bénéficient de certaines facilités administratives : liberté d’établissement pour les professions indépendantes, accès plus rapide à certaines prestations sociales ou familiales. Cependant, plusieurs restrictions demeurent. Les étudiants algériens, par exemple, ne peuvent exercer un emploi sans autorisation provisoire et leur temps de travail est limité à 50 % de la durée annuelle, contre 60 % pour les autres étrangers hors Union européenne. Pour Thibaut Fleury Graff, le débat autour de ces différences montre la nécessité de « clarifier un cadre juridique devenu inégalitaire et obsolète ».
Un enjeu diplomatique majeur entre la France et l’Algérie
Alors que les relations diplomatiques France – Algérie se sont refroidies ces derniers mois, cette résolution parlementaire risque d’envenimer encore davantage la situation. L’Algérie n’a pour l’instant pas réagi officiellement. Pourtant, selon le professeur Fleury Graff, « la France a une obligation de négocier avec l’Algérie avant toute dénonciation unilatérale ». En cas d’échec des discussions, le droit commun du Ceseda s’appliquerait aux ressortissants algériens, sauf si les accords d’Évian de 1962 étaient réinterprétés, une hypothèse jugée « hautement incertaine ».
Le député Charles Rodwell (Renaissance) met en garde contre un « vide juridique » pouvant, paradoxalement, rétablir la libre circulation entre les deux pays — un scénario jugé politiquement explosif. La polémique autour des accords de 1968 illustre la complexité du lien historique et politique France – Algérie. Derrière ce vote symbolique, se cache un débat sensible sur la souveraineté, l’immigration et la mémoire postcoloniale. Une renégociation pourrait redéfinir durablement les rapports entre les deux nations.