Suite à la visite du ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot à Alger le 6 avril, un autre représentant du gouvernement français est bientôt attendu dans la capitale algérienne. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, se prépare à discuter des aspects de la coopération judiciaire inscrits dans le plan d’action établi par les présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron, visant à normaliser les relations entre les deux nations.
Les discussions devraient principalement porter sur les problématiques des « biens mal acquis » et des extraditions. La venue de Jean-Noël Barrot a permis de renouer le dialogue entre Alger et Paris, après une période de huit mois marquée par une réduction significative des contacts. Cette rencontre a aussi été l’occasion de mettre en avant des signaux positifs et d’aborder ouvertement tous les sujets de la relation bilatérale, y compris les plus sensibles.
Gérald Darmanin est sur le point de se rendre à Alger pour une visite, un événement impliquant l’Algérie et la France
Suite à une longue période de tension, une visite visant à renouer les liens a marqué un progrès significatif. Les deux parties ont convenu de « relancer immédiatement tous les mécanismes de coopération dans divers domaines », a annoncé le ministre des Affaires étrangères français dimanche, suite à sa rencontre avec le président Abdelmadjid Tebboune.
Après un long gel des relations, les affaires s’accumulent et il est urgent de les traiter pour les deux capitales, surtout que certains sujets sont particulièrement pressants. Le ministre Jean-Noël Barrot a également annoncé que Gérald Darmanin, son homologue de la Justice, visitera bientôt l’Algérie, ce qui marquera la reprise du dialogue judiciaire entre les deux nations. Parmi les sujets à aborder, il a mentionné la question des biens mal acquis, en particulier l’exécution des commissions rogatoires demandées par la justice algérienne.
Cette question est traitée différemment par Alger, qui cherche à récupérer les biens des oligarques condamnés durant l’ère d’Abdelaziz Bouteflika pour corruption. « La France n’a pas répondu à près de 100 commissions rogatoires envoyées par l’Algérie, protégeant ainsi les corrompus et les biens issus de la corruption », a déploré le diplomate Abdelaziz Rahabi dans un entretien avec TSA le 18 mars. Jean-Noël Barrot a aussi mentionné une invitation des services du Parquet national financier à leurs homologues algériens pour venir à Paris afin d’examiner tous les dossiers en suspens.
Gérald Darmanin prévoit une visite à Alger, en Algérie, dans un avenir proche

Gérald Darmanin est attendu prochainement à Alger pour discuter directement des besoins algériens, selon des sources fiables. Les discussions entre les deux nations achoppent sur les extraditions, un sujet sensible. L’Algérie et la France divergent sur les méthodes de traitement des individus que l’Algérie souhaite extrader et que la France souhaite expulser.
En particulier, l’Algérie conteste le processus français de sélection des personnes à expulser. La justice algérienne exige l’extradition de plusieurs personnes résidant en France, accusées ou condamnées en Algérie pour corruption durant le régime précédent ou pour des actes de subversion. Jusqu’à présent, aucune extradition n’a été effectuée par la France, du moins aucune n’a été annoncée publiquement. En janvier, l’Algérie a critiqué la sélection par la France des cas d’extradition, demandant le renvoi des clandestins tout en refusant d’extrader les personnes recherchées.
Les deux pays sont liés par une convention d’entraide judiciaire signée en 2019 et ratifiée par les deux nations en 2021. Cette convention stipule un engagement mutuel à l’extradition selon des conditions définies. L’affaire la plus notable est celle d’Abdeslam Bouchouareb, ancien ministre de l’Industrie, condamné en Algérie à cinq reprises à 20 ans de prison pour corruption. Malgré six demandes d’extradition algériennes, il ne sera pas extradé suite à une décision définitive de la cour d’appel d’Aix-en-Provence en mars dernier.
L’Algérie a exprimé par le biais de son ministère des Affaires étrangères son mécontentement face à ce qu’elle considère comme une absence totale de coopération française en matière d’entraide judiciaire, malgré les nombreux accords internationaux et bilatéraux existants.
Extraditions : une première épreuve significative pour la détente entre Alger et Paris
Dans un autre cas très médiatisé, la justice française a refusé à plusieurs reprises d’extrader un leader du MAK, considéré comme une organisation terroriste par l’Algérie. Cependant, l’Algérie a réussi à obtenir des extraditions d’autres pays, comme celle de l’ex-PDG de Sonatrach, Abdelmoumene Ould Kaddour, par les Émirats arabes unis, ou encore celle de deux anciens militaires par l’Espagne et celle de Yacoub Belhasni par l’Allemagne.
En avril 2023, le président algérien a annoncé que l’Espagne avait accepté de restituer trois hôtels appartenant à Ali Haddad, ancien président du patronat algérien. La visite prochaine de Gérald Darmanin en Algérie soulève des interrogations sur la progression de ces dossiers délicats, les discussions s’informant complexes, surtout que la France pourrait invoquer l’indépendance de sa justice.