La pandémie du covid-19 continue de faire des ravages particulièrement en Kabylie, notamment à cause du manque d’oxygène dans les structures sanitaires. Le nombre de victimes aurait continué d’augmenter sans la mobilisation et la solidarité des citoyennes et citoyens Kabyles, y compris ceux de la diaspora, qui ont permis de réunir les fonds nécessaires pour acheter notamment de l’oxygène et des appareils de production d’oxygène.
Au lieu d’appuyer ce vaste mouvement d’entraide populaire traditionnelle, le gouvernement algérien a, au contraire, tenté de le décourager en mettant en place maints obstacles administratifs comme « l’autorisation d’acheminement des dons » ou l’obligation de « remettre les dons au ministère algérien de la santé qui les répartirait ensuite au niveau national ».
Une fois de plus, le gouvernement algérien empêche ainsi les Kabyles de mettre en œuvre leur traditionnelle « Tiwizi », solidarité, une des valeurs fondamentales de leur culture.
Depuis le neuf août dernier, les habitants de plusieurs régions de Kabylie, particulièrement de Vgayet et de Tizi-Wezzu, se sont réveillés face à plusieurs dizaines de départs de feu.
Au troisième jour, les incendies ne sont toujours pas maitrisés. D’après plusieurs sources, ils ont déjà fait plus de 70 morts, des centaines de blessés, des maisons ont brûlé, des routes coupées et des champs d’arbres fruitiers et des centaines d’hectares de forêts ont été réduits en cendres.
La Kabylie vit l’enfer dans le sens propre du mot et les scènes détresse jamais connues jusque-là, se multiplient. Des villages de montagne sont toujours sous la menace des flammes et aucune action exceptionnelle de secours n’a été mise en place par le gouvernement. La lutte contre le feu en Kabylie est menée avec des capacités dérisoires alors qu’elle aurait pu bénéficier des moyens disponibles dans les régions voisines comme Alger ou Sétif qui se trouvent à environ une heure de route de Tizi-Wezzu et de Vgayet.
Il est également nécessaire de s’interroger sur la non mobilisation des hommes et du matériel (de génie-civil et les hélicoptères notamment) de l’armée algérienne qui dispose pourtant de nombreux casernements en Kabylie dont certains sont implantés au milieu des forêts kabyles. Plusieurs offres d’aide internationale provenant notamment des pays voisins ont été refusées par le gouvernement algérien. Il y a manifestement de la part du régime algérien, non assistance à personnes en danger de mort en Kabylie.
Le ministre algérien de l’intérieur, Kamel Beldjoud a déclaré le 10 août à Tizi-Wezzu que les incendies en Kabylie « sont d’origine criminelle ». Le ministre qui fait une annonce aussi grave, devrait alors dévoiler les noms des criminels qui ont allumé les 70 départs de feu ou au minimum diligenter une enquête sur le sujet. Les Kabyles ont le droit de savoir qui veut brûler la Kabylie et
pourquoi ?
En réalité, depuis de nombreuses années, chaque été la Kabylie est brûlée par des mains criminelles sans que jamais une enquête n’ait été ordonnée pour démasquer les auteurs et les responsables de ce crime autant humain, qu’économique et écologique. De fait, au cours des vingt dernières années, les feux de forêts et l’insécurité d’une manière générale, ont augmenté parallèlement à l’accroissement du nombre d’implantations de structures policières et militaires, jusqu’à faire de la Kabylie le territoire le plus militarisé d’Algérie.
De l’avis de nombreux observateurs, il y a un lien direct entre la présence policière et militaire excessive en Kabylie et le processus de délabrement multidimensionnel que connait ce territoire.
Pour le Congrès Mondial Amazigh (CMA) le régime militaire algérien, y compris sa façade civile, veut punir la Kabylie et son peuple qui souhaitent conserver et protéger leur existence et leur singularité linguistique, culturelle, sociale, politique, historique et civilisationnelle. Visiblement, pour le régime algérien, la Kabylie doit être normalisée, c’est-à-dire devenir complètement « arabe et islamique » ou disparaitre. Mais la Kabylie ne peut pas accepter ce sort comme elle ne veut pas continuer à survivre dans les drames, les souffrances et le dépérissement socioéconomique.
Le CMA appelle donc une nouvelle fois le pouvoir algérien à entamer un dialogue sincère avec les représentants légitimes de la Kabylie, désignés par les Kabyles eux-mêmes, pour résoudre définitivement le lourd différend qui l’oppose à ce territoire et à son peuple et pour construire un avenir de paix, de bon voisinage et d’amitié. Le CMA va saisir officiellement l’ONU et l’UA afin de leur demander de soutenir ce projet de dialogue et d’assister les Kabyles et le gouvernement algérien, dans le but de trouver une issue durable, favorable aux deux parties sur la base du droit international.
Dans l’urgence et afin d’arrêter la spirale dramatique particulièrement en Kabylie, le CMA lance un appel urgent et pressant aux instances internationales, aux ONG humanitaires et aux gouvernements des pays proches de l’Algérie (Tunisie, Maroc, Italie, France, Espagne…) afin d’insister de toutes leurs forces auprès des autorités algériennes pour obtenir l’autorisation d’envoyer des secours en Kabylie.
Paris, 31/07/2971 – 11/08/2021
Le Bureau du CMA