De nouvelles inquiétantes informations nous parviennent de la direction générale de Sonatrach. Le PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar, ne cesse de se targuer en pleines réunions regroupants les cadres les plus importants et influents de la compagnie nationale des hydrocarbures que ses décisions et orientations sont quotidiennement approuvées par le Premier-ministre, Abdelaziz Djerad, et les « Moukhabarat », à savoir les services de renseignements algériens.
Algérie Part a pu confirmer effectivement au cours de ses investigations que le PDG de Sonatrach implique ouvertement dans sa gestion troublante et chaotique de plusieurs dossiers délicats du secteur des hydrocarbures l’appareil sécuritaire le plus sensible de l’Etat, à savoir les services secrets. A chaque fois que l’un de ses collaborateurs ou vice-présidents du groupe Sonatrach lui fait remarquer que l’une de ses directives risquent de violer une disposition réglementaire, Toufik Hakkar bondit et sort de ses gonds pour menacer ses interlocuteurs en brandissant le sempiternel argument : « Moi j’ai derrière moi le Premier-ministre et les Moukhabarat » !
Jamais un manager de Sonatrach n’a pu « politiser » à ce point le management de la compagnie nationale des hydrocarbures. Dans des réunions officielles de la direction générale, les collaborateurs du PDG ne peuvent plus faire des observateurs concernant la légalité de certaines modalités de passations de marchés ou les conditions de réalisations de certains nouveaux investissements. Le PDG Toufik Hakkar se contrefiche de la loi ou de la réglementation. A l’entendre, le feu vert du Premier-ministre, Abdelaziz Djerad, et des hauts responsables des services secrets algériens lui suffit largement pour prendre toutes les décisions qui lui semblent justifiées.
Cependant, aucune loi n’autorise l’implication des Moukhabarat dans la gestion économique interne des sociétés économiques publiques en Algérie. L’ex-DRS dispose, certes, de ses relais au sein des entreprises les plus stratégiques comme Sonatrach, mais l’objectif de ces officiers en mission secrète est de veiller sur l’utilisation saine de l’argent public et la protection de l’intérêt économique national. Il n’est aucunement autorisé qu’un colonel ou un général des services secrets algériens s’impliquent dans le management de Sonatrach. Ils ne sont ni doués ni compétents pour cette mission.
Mais Toufik Hakkar utilise volontiers les Moukhabarat pour effrayer ses interlocuteurs et imposer ses décisions les plus controversées alors que la santé financière de Sonatrach est plus que jamais fragile avec des pertes avoisinant les 13 milliards de dollars en 2020 par rapport à 2019. Et cette année 2021, Sonatrach a perdra également au moins 10 milliards de dollars de ses recettes en devises à l’exportation en raison de la faiblesse de son outil de production et des faibles volumes du pétrole brut ou gaz naturel exporté à l’étranger.
Malgré cela, Toufik Hakkar se présente comme le petit protégé du Premier-ministre et des services secrets. Comment est-ce possible ? C’est la question qui revient sur les lèvres de tous les cadres actuels de Sonatrach très inquiets par l’intrusion excessive des décideurs politiques et sécuritaires dans les affaires internes de Sonatrach qui doivent être régies par une logique économique et non pas une logique politicienne mercantile.
Cette situation inédite au sein de Sonatrach y compris lors de la décennie noire des années 90 a été, pourtant, anticipée par les révélations d’Algérie Part qui ont décrit les mécanismes sournois de ce clanisme mis en place depuis l’arrivée de Toufik Hakkar à la tête de Sonatrach au début du mois de février 2020. Parrainé par Djerad, Algérie Part a révélé à maintes reprises comment Toufik Hakkar est devenu l’homme fort du secteur des hydrocarbures amassant un pouvoir absolu que plus personne ne peut contester.
Le PDG de Sonatrach rend directement compte à Abdelaziz Djerad et travaille sous sa coupe. Les deux hommes définissent les intérêts communs, les projets à mener et les enjeux majeurs qu’il faut défendre. Or, Djerad est un énarque et enfant chéri de la bureaucratie algérienne. Le secteur économique créateur de richesses et d’emplois, il n’en connait pas un seul bout ! Malgré cela, il se fie à Toufik Hakkar dont le parcours à Sonatrach est très médiocre et insignifiant. Cet aveuglement clanique a causé des pertes financières immenses à l’Algérie tout en suscitant un climat de tension et un malaise permanent au sein de la compagnie nationale des hydrocarbures. Les « services » algériens connaissent cette réalité amère car les bilans comptables et financiers de Sonatrach, personne ne peut les ignorer. Décidément, même au sein des Moukhabarat, Toufik Hakkar est « protégé » comme il le dit si bien à ses collaborateurs. Triste « Nouvelle Algérie ».