le360.ma-Les dirigeants algériens ne cessent de gloser sur l’ennemi étranger. Pourtant, selon une enquête de Arab Barometer, repris par Algérie-Part, seulement 3% des Algériens craignent cette prétendue ingérence, alors qu’ils sont 40% à s’inquiéter pour la situation économique.
Les dirigeants algériens voient derrière tout problème lié à leur gestion du pays, la «main étrangère», la «main invisible», ou l’«ennemi étranger», d’après les diverses expressions utilisées selon les circonstances. Dernière en date, face à la flambée des prix des fruits et légumes en dépit des menaces des autorités, le ministre du Commerce, Kamel Rezig, n’a pas hésité à pointer du doigt «la main invisible», responsable selon lui de «crises préfabriquées».
Seulement, à force de brandir cette «main invisible de l’étranger» à chaque situation problématique, les citoyens algériens ont compris clairement que les dirigeants cherchent à cacher leurs échecs dans tous les domaines derrière cette fameuse «main». Une insulte à l’intelligence des Algériens qui savent pertinemment qu’il n’y a aucune ingérence régionale ou internationale dans les échecs successifs et multiformes du régime.
D’ailleurs, l’enquête menée en 2019 par Arab Barometer, une organisation indépendante, partenaire de l’Université de Princeton aux Etats-Unis, est très révélatrice de ce que pensent et de ce qui préoccupent les citoyens algériens, en dépit des campagnes médiatiques initiées par le régime.
D’après ce rapport, qui s’est penchée sur les angoisses et les préoccupations de cette population, «40% des Algériens sondés affirment que la situation économique et financière de leur pays représente le principal défi que leur pays doit relever dans les prochaines années», selon Algérie-Part. La préoccupation principale des Algériens est donc la détérioration de leurs conditions de vie. Ainsi, «les Algériens ont davantage peur de la dégradation de la situation économique et financière de leur pays et de l’impact de la corruption sur le quotidien que des menaces provenant de l’extérieur du pays qui sont quotidiennement mises en exergue et en avant par le régime algérien pour justifier sa politique répressive et liberticide», comme l’explique le site.
Le contenu du rapport publié en 2019 est encore plus d’actualité aujourd’hui avec la dégradation du pouvoir d’achat à cause de la flambée des prix de presque tous les produits alimentaires et la multiplication des pénuries. Une situation qui risque aussi de s’aggraver durant les mois à venir, à cause de la décision prise par les autorités dans le projet de loi de finances 2020 visant la suppression des subventions et leur remplacement par des mesures ciblées en faveur des classes défavorisées.
Si cette décision est nécessaire afin de réduire le déficit budgétaire abyssal, la fin des subventions risque d’entraîner, davantage encore, la paupérisation de la classe moyenne. Elle a en effet vu son pouvoir d’achat chuter inexorablement sous l’effet de l’inflation consécutive à la flambée des cours des produits, engendrée par des politiques mal préparées et mal exécutées des autorités. La décision, comme c’est souvent le cas, n’a pas été mûrement étudiée et le contexte actuel de crise est loin d’être favorable. Seulement, la classe dirigeante n’a cure de la détérioration des conditions de vie des citoyens algériens. Leur principal intérêt est de réduire le déficit budgétaire et ne pas être obligés de recourir à l’endettement extérieur.
Loin derrière la crise économique, selon les résultats du sondage, les Algériens sont préoccupés par l’impact de la corruption endémique des dirigeants sur leur quotidien. Ils sont au moins 22% à estimer que ce fléau représente l’un des défis majeurs qui menacent la stabilité du pays. Les arrestations des anciens hauts gradés de l’armée, des hautes personnalités politiques de l’ancien régime et des oligarques prouvent que les Algériens ont bien raison de se préoccuper de l’impact de la corruption qui a mis à genou leur pays.
Et la troisième préoccupation majeure des Algériens est la qualité des services publics. Ils sont 19% à espérer une amélioration des principaux services basiques.
Quant à l’ingérence étrangère, tant chantée par les régimes successifs algériens, surtout celui que dirige actuellement Abdelmadjid Tebboune, il ne représente que 3% des préoccupations des Algériens, au même titre que l’insécurité (2%) et la menace terroriste (2%).
«La propagande du régime algérien, menée ainsi depuis de longues années contre le danger de la ”mai étrangère” et les menaces de certaines puissances régionales ou mondiales contre la souveraineté nationale, n’a donc jamais produit le moindre effet persuasif sur l’opinion publique algérienne. Cette propagande n’a jamais réussi à manipuler des pans de la société algérienne parce qu’elle a échoué à éveiller de quelconques peurs ou frayeurs nourries par des menaces provenant de l’étranger», conclut Algérie-Part.
Bref, ce qui préoccupe les Algériens, ce sont des problèmes internes, notamment ceux liés à leurs conditions de vie qui se dégradent de jour en jour à cause des politiques choisies par le système en place. Il est temps que les dirigeants arrêtent de focaliser leur regard sur l’ennemi fantasmagorique extérieur pour essayer de cacher ses échecs internes qui ont conduit à la paupérisation grandissante de la classe moyenne. Le peuple algérien n’est pas dupe…