À 80 ans, l’écrivain Boualem Sansal est condamné à 5 ans de prison pour atteinte à l’unité nationale. Paris mise sur une grâce présidentielle. Une affaire explosive aux allures de crise diplomatique.
Boualem Sansal : l’écrivain de 80 ans derrière les barreaux : choc à Alger, tollé à Paris
La nouvelle est tombée comme un couperet. Ce mardi 1er juillet, la Cour d’appel d’Alger a confirmé la peine de cinq ans de prison ferme contre Boualem Sansal, l’un des auteurs algériens les plus traduits à l’international. À 80 ans, l’intellectuel est jugé coupable de « atteinte à l’unité nationale », « outrage à corps constitué » et « pratiques nuisibles à l’économie nationale ».
Le parquet avait pourtant été plus sévère : 10 ans de réclusion et un million de dinars d’amende avaient été requis, sans appel. La défense, absente à l’audience faute de visa pour l’avocat français, dénonce un procès expéditif. Les observateurs crient à l’injustice. L’écrivain, lui, parle de « procès contre la littérature ».
Israël, l’armée et des messages privés : ce qui a aggravé son cas
Tout a commencé en novembre 2024, lorsque Sansal est arrêté à l’aéroport d’Alger. Ce qui devait être une simple affaire judiciaire se transforme en bombe politique. Durant son procès, l’auteur a été interrogé sur ses œuvres critiques envers le régime algérien, ses voyages en Israël, et surtout, des échanges privés avec un ancien ambassadeur français, dans lesquels il évoquait le chef d’état-major algérien.
Des propos jugés « irrespectueux », mais pour Boualem Sansal, il s’agit simplement d’exercer une liberté d’expression garantie par la Constitution. La juge ne l’entend pas ainsi. L’audience a viré à l’orage verbal, dans une atmosphère lourde, presque irréelle. Aucun avocat pour assurer sa défense. Un octogénaire seul face à la justice de son pays.
Crise algéro-française relancée : Paris supplie, Tebboune garde le silence
Au-delà du sort personnel de Boualem Sansal, la tension entre Paris et Alger atteint un nouveau sommet. Depuis la reconnaissance par la France, en juillet 2024, d’un plan d’autonomie au Sahara occidental sous souveraineté marocaine, les relations sont glaciales. L’arrestation de Sansal est perçue, côté français, comme une représaille politique.
Aujourd’hui, tous les regards sont tournés vers le président Abdelmadjid Tebboune. Paris implore une grâce présidentielle, invoquant l’âge avancé de l’écrivain. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, parle d’un nécessaire « geste humanitaire ».
La pression monte. Des figures de la scène littéraire française, dont Yasmina Khadra, montent au créneau. L’affaire dépasse le simple cadre judiciaire. Elle est devenue un symbole de la liberté d’expression étouffée, de la littérature muselée, et du bras de fer diplomatique entre deux capitales qui n’en finissent plus de s’opposer.